PROPOSITION DE LA MAMA EN TANT QUE SAGE-FEMME LIBERALE, ET COMMENT LE CONCEPT D’ALLIANCE THERAPEUTIQUE PEUT NOUS GUIDER DANS CETTE PROPOSITION

Véronique Verkimpe

 

Dans mon métier de sage-femme, je rencontre tous les jours des couples confrontés à cette question de la régulation des naissances. C’est une question importante, mais à laquelle notre société actuelle donne une réponse non seulement rapide mais surtout réductrice et non respectueuse des personnes et du sens de l’acte conjugal.  Or la grande majorité de nos concitoyens, et donc de mes patientes n’ont jamais entendu parler d’autre chose que de technique contraceptive. Nous devons susciter les questions. Personne d’autre ne le fera !

Pour cela, je parle aux femmes que je rencontre de la MAMA ( Méthode d’Allaitement Maternel et d’Aménorrhée, en anglais Lactation Aménorrhée Method). Il s’agit d’une méthode  de régulation des naissances utilisable uniquement pendant l’allaitement complet d’un bébé, lors des 6 premiers mois. Il faut que l’allaitement soit exclusif, directement au sein, que la femme n’ait pas eu son retour de couches, et enfin que le bébé prenne au minimum 6 tétées par  vingt-quatre heures. .Ce n’est pas une simple question technique, car sinon, quelle différence avec les méthodes contraceptives ?   Ici, j’explique simplement comment fonctionne la nature, qui fait que l’allaitement retarde la reprise de la fertilité afin que la maman ait du temps pour s’occuper de son bébé, tout en continuant à vivre avec son mari des unions sexuelles qui nourrissent leur amour conjugal. Il y a des études très sérieuses, faites par l’OMS et diffusées dans le monde entier, car l’OMS a vu que l’allaitement maternel  était bon non seulement pour l’enfant, mais aussi pour la mère, entre autre à travers l’espacement entre 2 naissances.

En pratique, comment cela se passe-t-il au quotidien ?

Déjà, se pose le problème de l’allaitement complet. L’accompagnement dans les débuts de l’allaitement est très mal fait en France et beaucoup de maman sortent de la maternité avec un allaitement mixte, ou plus du tout d’allaitement, sans l’avoir voulu. Ensuite, dans certaines cultures, l’allaitement mixte est beaucoup pratiqué par commodité, afin de pouvoir confier l’enfant plus facilement. Ou encore, certaines mamans veulent que leur conjoint « participe » à l’alimentation du bébé, et donc puisse donner le biberon. Il faudrait déjà améliorer cela, et ce n’est pas facile !

En plus, ici, en France, la grande majorité des femmes sortent de la maternité avec une prescription de micro-pilule,  à savoir une mini-dose de progestérone quotidienne  « compatible avec l’allaitement ». On oublie de leur dire que la pilule passe dans le lait, à l’heure où l’écologie nous pousse à éliminer les hormones de l’alimentation animale…. On oublie de leur dire que la contraception hormonale pendant l’allaitement fait baisser la production de lait chez beaucoup de femmes. Et surtout, on leur fait croire que la contraception est un bien, que la fertilité est une maladie, et qu’il est « responsable » de prendre une contraception. On envisage la « grossesse surprise » comme la pire catastrophe qui pourrait arriver à une femme ou un couple. Et de façon complètement contradictoire, on leur dit de suite après qu’il existe la pilule du lendemain et que l’IVG est une opération facile et sans conséquences…

Ceci dit, attention à ne pas rester sur une approche purement écologique, sinon la femme sera tentée de se faire poser un stérilet au cuivre ou d’utiliser un préservatif. Il est essentiel de leur faire voir la beauté de la relation sexuelle dans l’ensemble d’une vie conjugale. Et là, ce n’est pas simple, car plus de la moitié de mes patientes ne sont pas mariées… !

Ce qui complique encore les choses est le fait qu’autour de moi, personne ne soutient ma proposition.  A l’hôpital, les sages-femmes ne parlent que de pilule, stérilet, implant (posé 3 jours après la naissance), à la rigueur de préservatif, en attendant mieux….A la PMI( Centre de protection maternelle et infantile), où les mamans vont faire peser  et vacciner le bébé, les puéricultrices leur demandent si elles ont bien pris la pilule. A la visite post-natale, 2 mois après la naissance, le gynécologue leur assène de façon péremptoire que l’ »allaitement n’est pas efficace comme contraception» ! Bref, c’est malheureusement souvent celui qui a parlé en dernier qui emporte l’adhésion….

En pratique, presque toutes sont intéressées, y compris les conjoints, un certain nombre l’appliquent au début, jusqu’à la visite chez le gynécologue, très peu résistent et à peine 2 par ans continuent ensuite un suivi avec les méthodes naturelles. Cela pourrait être décourageant…Heureusement, je ne suis pas seule, les rencontres entre monitrices en régulation naturelle des naissances, ainsi que les cours du Master « fertilité et sexualité » conjugale », proposé par l’Institut Jean-Paul II m’aident beaucoup.

Pendant ce Master, le concept d’alliance thérapeutique que nous avons étudié m’a aidé et me soutient dans cette démarche inhabituelle autour de moi. En effet, le lien entre le soignant et le soigné se base sur le lien entre Dieu et son peuple, et sur le fait que Dieu nous sauve : « il prend soin des brebis qui allaitent leurs petits » nous dit la Bible, quelle belle image pour une sage-femme ! Je fais plus que présenter une méthode écologique, je soigne le lien mère-enfant mais aussi le lien conjugal et familial. J’aborde chaque patiente dans une démarche globale. Je ne soigne pas seulement telle ou telle partie de son corps, mais la personne toute entière. Je ne me situe pas dans une position de supériorité, établie grâce à mon diplôme, mais je considère que la maman ou le couple en face de moi sont responsables et capables d’entendre ma proposition. Bien sûr, Il faut proposer de façon respectueuse, sans s’imposer.  Il m’arrive parfois de parler du mariage et très souvent du sens de la relation sexuelle. Je souhaite  aider mes patientes et leurs maris  à redonner du sens à leur intimité conjugale, tout son  sens !

Cette proposition de la MAMA est un premier pas dans cette direction.