LA CONTINENCE : INCONVENIENT DE CE MODE DE VIE OU NECESSITE POUR LE COUPLE ?

Jean-Marie et Véronique Péridy (Amour et Vérité)

 

V Les couples qui souhaitent vivre une paternité et une maternité responsables sont amenés à vivre des temps sans union sexuelle pendant la période fertile du cycle de la femme.  Nous l’appelons  temps de continence, plutôt qu’abstinence car on ne s’abstient pas d’aimer.

Ce temps est-il un inconvénient de ce mode de vie, ou mieux de cet art de vivre, ou est-ce au contraire une nécessité pour faire grandir l’amour ? Nous allons ébaucher quelques éléments de réponses en recherchant ce qui manquerait aux couples dans l’hypothèse fictive où l’on pourrait maîtriser notre fertilité de manière naturelle et sans avoir à vivre la continence.

JM Pour l’homme 

Tout d’abord quelques points spécifiques concernant l’homme :

-         l’homme de manière générale est plus dans l’immédiateté. Il peut donc se décider pour une union sexuelle très rapidement. Mais est-ce là le chemin du véritable épanouissement, le chemin du bonheur de se donner et de recevoir ?

-         On le sait : on ne peut bien donner que ce que l’on maîtrise. Ce temps de continence va contribuer à développer en l’homme la maîtrise de ses envies dont il aura besoin afin de vivre des unions charnelles satisfaisantes pour sa femme et lui-même.   

-         Cette alternance de périodes fertiles et non fertiles est un cadeau de notre femme qui nous permet d’apprendre la patience et la maîtrise de soi pour un plus grand don.                                  Cette attente nous permet de donner de la valeur à ce qu’on vit.  Ainsi Mesdames, vous nous permettez de mieux apprécier les temps d’intimité. Ils vont prendre d’autant plus d’importance qu’ils auront été attendus, …. Sans trop exagérer non plus !

 V Pour la femme 

Nous aussi ne nous manquerait-il pas quelque chose d’essentiel  sans ces temps de continence ?

o   Sentir que notre mari nous aime même en dehors des relations conjugales, ce qui nous est indispensable pour pouvoir se donner entièrement et sans réserve.

o   Nous sentir aimées et respectées pour nous-mêmes, telles que nous sommes et entièrement.

JM Un soir, un homme me disait : « je sens bien que si ma femme prenait la pilule, cela ne serait plus vraiment entièrement ma femme, je ne la respecterais plus comme actuellement. »

o   V Ce temps de continence est essentiel aussi pour nous afin de ne pas nous sentir utilisées mais reconnues dans toute notre personnalité. Pour Saint Jean-Paul II, le contraire de l’amour n’est pas la haine, mais l’utilisation.

o   Et il nous manquerait aussi une forme de tendresse indispensable pour nous sentir vraiment aimées. Il nous manquerait de prendre le temps d’exprimer d’autres langages de l’amour : passer des moments de qualité ensemble, se rendre service, effectuer un service ensemble, se dire des paroles valorisantes, encourageantes. prier ensemble si on est croyant.  On comprend ainsi pourquoi Saint Jean-Paul II dans son livre Amour et responsabilité  nous dit : « il ne peut pas y avoir de véritable tendresse sans véritable continence. » Et que deviens un couple sans tendresse ? La tendresse dans nos unions n’est-il point une différence importante qui nous distingue de l’animal ?

Tout ces éléments ne nous permettent-ils pas, nous les femmes, de renouveler notre désir d’union charnelle qui a tant besoin d’être le couronnement de l’expression de notre amour conjugale reçu et donné ?

JM Pour le couple 

De même pour le couple :

-        Nous le savons, les psychologues le disent : « le désir directement assouvi tue le désir. » Ne passerions nous pas à côté d’une éducation au désir et au bonheur ? En effet  la relation sexuelle n’est pas un dû, ou un exercice du couple avec une jouissance au bout, quand je veux ou le plus possible. Vivre le manque  est essentiel dans toute notre vie, même au niveau des unions sexuelles.

V Un couple témoigne:" Notre couple souffre d'hypofertilité. De fait nous pouvons avoir autant de relations que nous le voulons. Mais après quelques années de mariage nous nous sommes rendus compte que notre désir diminuait, et naturellement nous vivons maintenant des temps de continence pour renouveler notre désir.

Ainsi on voit que cette continence périodique ne peut que renouveler le désir et nous aider à goûter des moments de vrai bonheur.

-        JM il n’y a pas longtemps, un jeune couple nous disait : « une fois qu’on a parlé de glaire, il n’y a plus de tabous. On peut parler de tout. » Ainsi pendant les temps de continence nous pouvons parler également de nos désirs plus librement.

-        La continence nous permet donc d’enrichir notre communication. Ne va-t-elle pas nous laisser plus de temps pour parler de notre vie en général, de nos attentes et aussi des évènements un peu plus difficiles ? Notre écoute et l’attention à l’autre n’en seront-ils pas développés ? Tout cela permettra aussi de vivre  au mieux la relation sexuelle.

-        Finalement en ne vivant des unions qu’en période choisie, n’exprimons-nous pas un amour plus fort qu’en répondant sans retenue à nos envies ou pulsions ?

V Un couple nous a donné ce témoignage : « Nous sommes mariés depuis quelques années. Dès nos fiançailles s'était posé le problème de la contraception. Etant âgés respectivement de 51 et 45 ans et affectés de problèmes de santé, il nous a paru préférable d'être responsables et de cantonner notre fécondité au plan spirituel. Je me suis imaginée, quelle erreur, que Jean-Louis ne comprendrait pas cette exigence d'ascèse et de maîtrise de soi dont je supposais qu'elle était la clé de la méthode naturelle. J'ai donc opté pour une pilule. Le résultat a été catastrophique: tantôt pas de règles, tantôt des règles très longues. Je ne savais plus où j'en étais ni dans ma tête ni dans mon corps. Quatre mois après avoir commencé ce "traitement", les hémorragies ont duré tout un mois. Jean-Louis a compris que c'était une terrible violence faite à mon corps et j'ai été soulagée le dernier soir du cycle lorsqu'il m'a dit: "je ne suis plus d'accord, demain tu ne reprends pas la pilule. » Depuis que nous utilisons les méthodes naturelles beaucoup de choses ont changé dans notre couple :

o   D'abord, nous avons plus parlé. Nous avons éliminé quelques quiproquos. Non, mon mari n'est pas d'abord une bête assoiffée de sexe; oui il attache de l'importance au respect du rythme biologique de l'autre. Non les méthodes naturelles ne sont pas d'abord un exercice d'ascèse, elles sont une véritable école de la tendresse.

o  Je pense que cela n'est pas étrange si, depuis que nous utilisons la méthode, Jean-Louis et moi sommes plus attentifs l'un à l'autre et avons constaté que nos unions nous procuraient un plaisir beaucoup plus intense. Nous pouvons enfin faire coïncider nos corps, nos cœurs et nos consciences! »

 

-        JM Un des éléments qui rend difficile de durer en couple, c’est la routine. Or avec ces alternances de périodes fertiles et de périodes infertiles, nous avons une femme différente chaque matin. Nous sortons de la routine naturellement. Et du coup, nous apprenons à nous aimer en accueillant la nouveauté de chaque jour, grâce à la femme !

-        Aussi la confiance l’un dans l’autre ne va-t-elle pas grandir ? La femme qui engage son corps, et durablement si elle devient enceinte lors d’une union sexuelle, fait confiance en l’homme pour se maîtriser dans les périodes fertiles. L'homme aussi doit compter sur des observations fiables de sa femme. Et par-dessus tout, la tempérance mise en application fera grandir la confiance en la fidélité conjugale.

-        De fait, cette tempérance exercée au cours des différents cycles va agir comme le ressort d’un sécateur. Il suffit d’une petite pression sur le ressort du sécateur pour que nous démultipliions notre force. De même, cette tempérance développée au cours des cycles ne nous aidera-telle pas face aux tentations et dans tous les aspects de notre vie ? De même pour nous  préparer aux temps de séparation ou d’incapacité à s’unir qui peuvent très bien survenir à tout moment et de façon durable.

-        VP Le couple a besoin de chasteté, c’est-à-dire de se donner complètement dans toutes ses dimensions de l’être. Les seuls moments d’intimité conjugale n’y suffisent pas. Nous avons donc besoin d’exprimer notre amour de multiples manières. Alors nos temps d’intimité seront le couronnement de nos diverses façons de nous exprimer notre amour.

-        Le couple a besoin de transcendance. Durant la période de continence il se trouve confronté à la vie possible, à la vie qui vient d’ailleurs.

JM Comme il ne peut y avoir d’acte d’amour sans renoncement, ce renoncement charnel ponctuel ne va-t-il pas développer notre capacité d’aimer,  et donc de nous libérer de l’égoïsme, comme l’indiquait Saint Jean-Paul II dans Amour et responsabilité ?

La continence est donc nécessaire pour que chacun se sente vraiment aimé en vérité. Saint Jean-Paul II nous parle du corps comme prophète de la personne. C’est-à-dire que le corps parle au nom de la personne. Pour que le corps dise la vérité de l’amour sans hypocrisie, pour reprendre ses termes, et que ce langage soit reconnu comme tel, tout l’amour qui se dit pendant les temps de continence  contribuera à exprimer la réalité de notre amour.

Enfin, cette nécessité de la continence pour le couple ne l’est pas moins pour les enfants et pour la société dont la cellule de base est un couple et un couple solide qui s’aime.